Le contrôle de gestion
Le rapport dépenses!recettes de l’environnement est clairement établi
Dans la mesure où l’entreprise dispose déjà d’une direction de l’environnement ou de son équivalent, les coûts de son fonctionnement sont connus, bien que généralement réduits aux seuls frais généraux, sans trop d’analyse des retombées inévitables sur les coûts des autres fonctions de l’entreprise.
Beaucoup moins claire est la situation en matière d’analyse des recettes.
Deux notions sont à introduire ici :
– les recettes indirectes
– le coût du non-environnement
Les recettes indirectes concernent entre autres :
– la diminution des risques, qu’un responsable environnement devrait pouvoir négocier en termes de primes d’assurance et devrait pouvoir calculer en termes de diminution de frais d’entretien, de sécurité, etc. ;
– la meilleure maîtrise des déchets, que l’on devrait calculer en termes d’économies sur le traitement, le stockage, le transport, etc.
– la diminution des nuisances et, par conséquent, du coût des mesures anti-nuisances.
Le coût du non-environnement se calcule à partir de l’analyse des incidents et de leurs retombées financières, dont entre autres :
– les coûts d’arrêt technique pour cause de pollution accidentelle
– les coûts de remise en état
– les frais juridiques
A l’instar de leurs collègues allemands et hollandais, les grands organismes patronaux sectoriels seront amenés à mettre en place un début d’analyse statistique d’incidents qui permettrait aux entreprises du secteur de se mesurer par rapport à la concurrence.
Vous avez un budget annuel prévisionnel pour l’environnement Vous établissez un rapport vert quantifié annuel Le rapport mensuel de gestion contient une ligne environnement
L’une des raisons que l’on m’oppose souvent lorsque je suggère l’établissement d’un budget annuel environnement, est que les retombées de la plupart des efforts majeurs pour l’environnement (changement de matériaux, de processus, de méthodes, etc.) sont difficiles à prévoir et encore plus difficiles à quantifier.
En cela, le budget environnement n’est pas différent d’un budget recherche-développement dont les méthodes de contrôle budgétaire peuvent très souvent être transposées telles quelles.
Comme pour la recherche-développement, établir un budget, un plan à moyen ou long terme et un échéancier pour l’environnement suppose un effort d’imagination et d’anticipation qui sera bien évidemment démenti partiellement par les faits, ce qui n’a jamais empêché un responsable d’entreprise de planifier et d’étayer les budgets de son activité recherche-développement.
Votre bilan vert est contrôlé de façon autonome
L’objectif d’un bilan de l’environnement devrait être de rendre compte des réussites et des échecs du plan annuel d’environnement, et d’expliquer les efforts que l’entreprise s’impose pour l’année à venir.
C’est ainsi que le bilan de l’environnement est compris en Hollande, le pays où l’on a probablement l’expérience la plus longue dans ce domaine en Europe.
D’après l’expérience que nous avons vécue avec le bilan social en France, il apparaît qu’il faudra éviter deux écueils lors de l’introduction d’un bilan de l’environnement :
– le bilan d’autosatisfaction
– le bilan obligatoire
Le bilan social tourne trop souvent à une autosatisfaction, dans le rapport du président à l’Assemblée générale, pour qu’il ait encore une véritable crédibilité. Les chiffres, s’il y en a, sont essentiellement fournis pour confirmer les bons points que l’on se distribue.
Un bilan vert qui prendrait le même tournant ne servirait évidemment ni l’entreprise ni la communauté, en bref il serait inutile.
Le bilan de l’environnement obligatoire et contrôlé par un auditeur indépendant est un autre écueil et fait l’objet, depuis 1984, de vifs débats en Hollande, tranchés provisoirement en faveur de la liberté d’initiative de l’entreprise.
L’idée, défendue depuis peu par certains en France, est d’instaurer un corps d’auditeurs environnement, dont l’approbation du bilan annuel environnement serait rendue obligatoire, comme celle du bilan financier et de gestion par un commissaire aux comptes.
L’amalgame ainsi fait entre expertise comptable et audit environnement me paraît dangereuse et nuisible pour la cause de l’environnement, pour deux raisons.
> Une raison de forme
La gestion de l’environnement n’en est qu’à ses débuts, dans l’entreprise comme à l’extérieur, et des experts ès audit environnement, autres qu’autoproclamés, n’existent pas.
Faire expertiser obligatoirement par des non-experts un ensemble encore flou de postes de budgets, de structures et de résultats, ne me paraît pas la meilleure façon de faire entrer le facteur environnement dans la stratégie de l’entreprise.
>■ Une raison de fond
L’expert-comptable est comptable, vis-à-vis du conseil d’administration et vis-à-vis de l’ensemble des actionnaires, de l’exactitude des comptes que lui présentent les dirigeants de l’entreprise. Il a à se prononcer sur la bonne conduite de cette gestion et sur sa compatibilité avec les intérêts de l’entreprise et avec la législation en vigueur.
L’expert ès environnement serait comptable vis-à-vis de qui ? Des actionnaires de l’entreprise ? En cas de non-respect de la législation sur l’environnement par l’entreprise, il se trouverait immédiatement en conflit d’intérêt. Vis-à-vis de la communauté ? Laquelle ? Locale, nationale, européenne, plané-taire ? L’arbitraire s’installerait dès le départ.
L’expert ès environnement serait comptable de quoi ? De la conformité des processus et des produits aux normes et législations ? Ces dernières sont en pleine gestation à travers l’Europe des Douze, pour ne pas mentionner le reste du monde. Sans l’équivalent d’un plan comptable, l’expert n’aurait qu’à expertiser selon son bon sens, ce qui installerait à nouveau l’arbitraire, d’autant plus que l’environnement suppose une maîtrise intellectuelle des processus que personne ne peut prétendre posséder dans l’ensemble des secteurs industriels et des services.
On arrive à la conclusion, en observant les avantages et les inconvénients des systèmes volontaires d’audit de l’environnement, chez les Américains, les Allemands et les Hollandais, qu’une méthode d’audit volontariste à trois niveaux est celle qui convient à l’objectif fixé, qui est après tout de préserver ou d’améliorer l’environnement :
– un bilan quantitatif, calculant les dépenses et recettes (dans le sens expliqué ci-dessus) de l’année précédente, et le plan pour l’année à venir
– un audit extérieur, confirmant et commentant les chiffres avancées
– un rapport qualitatif.
L’expertise extérieure devient, dans ce cas, un soutien et non un casse-tête arbitraire, dont notamment nos amis allemands commencent à souffrir.